14 SEP 2020 · Je vous convie à découvrir l’épopée de Kadhafi. Il s’agit d’un des rares cas de coups d’État inspirés par une jeunesse insouciante et idéaliste sur le continent. Plus tard il y aura les exemples de Marien Ngouabi en République populaire du Congo ou encore de Thomas Sankara en Haute-Volta, l’actuel Burkina Faso. Dans cet épisode, nous allons voir comment comment un gamin de 27 ans a renversé la monarchie en Libye.
Le ciel est dégagé en cette nuit du 31 août 1967. Dans cette nuit claire une centaine de jeunes soldats s'affairent sur les routes de Benghazi et de Tripoli. Ils sont posés, sans pression aucune. L'un d'entre eux, Mouammar Kadhafi est même allé au lit plus tôt que prévu dans la caserne de Garyounès, à Benghazi. Posé OKLM dans son bando, il ne dort pas. Il écoute la radio.
À 2 heures et demi du matin, la fine équipe lance des assauts. Elle les a patiemment préparés. Les mutins prennent tour à tour des garnisons, des dépôts d'armes et de munitions, s'emparent des véhicules. Dans le même temps, les hauts responsables de l'armée sont arrêtés. Le colonel Abdulaziz al Chelhi, le chef de l'unité en charge de la protection rapprochée du roi de Libye est interpellé alors qu'il dort. Il va essayer de se cacher en plongeant dans sa piscine. Peine perdue. Il est vite repêché et conduit en détention. Le prince héritier Hassan Reda est lui aussi neutralisé par les mutins. Il a bien essayé de se cacher en coupant l’électricité au palais et en trouvant refuge dans un placard. Mais il est vite retrouvé en mis aux arrêts. Quelques ministres sont aussi soustraits des bras de Morphée.
Le dispositif sécuritaire de la monarchie n'a quasiment pas résisté.
Le roi Idris Premier est lui-même absent du pays. Il est parti quelques jours plus tôt en Grèce pour sa cure thermale annuelle. D'ailleurs il aurait déjà transmis sa volonté d'abdiquer au bénéfice du prince héritier dès son retour. Prince héritier qui se trouve pour l’instant entre les mains des jeunes soldats.
Et Mouammar Kadhafi dans tout ça, me direz-vous ?
Eh bien, lui et quelques autres amis se dirigent vers radio Benghazi pour y annoncer leur victoire. Cependant il y a un hic. Sa Jeep de tête se détache du reste du convoi par une erreur d'orientation. Les critiques avancent que le meneur de la révolution serait resté dans le confort de sa chambre pour écrire son discours de victoire. Quoi qu'il en soit, ce n'est qu'à 6 heures 50 que le leader arrive dans les studios de la radio. Musique !
Le matin du 1er septembre, les Libyens pourvus d'un poste récepteur apprennent alors pour la première fois ce qui est en train de se passer. Le communiqué n°1 est lu par la voix jeune mais ferme d'un officier que pratiquement personne ne connaît dans le pays.
« Peuple de Libye, dit-il, en accord avec ta libre volonté, exauçant tes vœux les plus chers, répondant à tes appels incessants en faveur du changement et de la régénération, à l'écoute de tes incitations à la révolte, tes forces armées ont renversé le régime réactionnaire et corrompu dont la puanteur nous suffoquait et dont la vue nous horrifiait.
D'un seul coup, ta vaillante armée a fait tomber les idoles et en a brisé les effigies.
D'un seul trait, elle a éclairé la nuit sombre dans laquelle s'étaient succédé la domination turque, la domination italienne et enfin la domination d'un régime réactionnaire et pourri. À compter de ce jour, la Libye est une République libre, gouvernée par elle-même, qui prend le nom de République arabe libyenne... »
Quelques instants après, le prince héritier annonce dans un communiqué qu'il renonce à ses droits de succession et se rallie aux putschistes.
Le monde est choqué par cette annonce, en commençant par les capitales américaines, britanniques italiennes et françaises qui ont d'importants intérêts en Libye. Tout de suite les révolutionnaires rassurent. Ils envoient des émissaires dans les chancelleries pour les rassurer de leurs bonnes intentions à leur égard.
Les Américains se persuadent, dans un premier temps, que le chef de ce ramdam est Saad al-Adin Abou Shua, un ex-officier de 34 ans. Dans l'opinion publique occidentale, Mouammar Kadhafi n'est que le porte-parole du Conseil de commandement de la Révolution. Cela prendra une semaine avant qu'on ne mette un visage sur ce nom. Kadhafi reprochera son imprudence au journal égyptien responsable de sa divulgation d'identité.
Le premier à reconnaître le nouveau gouvernement est le président égyptien Gamal Abdel Nasser.
Nous verrons tout à l'heure qu'il en est l'inspirateur, parfois sans le savoir.
Trois mois après avoir renversé les institutions, le Conseil de commandement de la Révolution publie sa composition. On apprend alors que le groupe est dirigé Mouammar Kadhafi, un lieutenant des transmissions âgé de 27 ans, récemment rétrogradé de son rang de capitaine pour indiscipline. Le putsch est réussi le 1er septembre, son chef sera promu colonel dès le 8 septembre 1969.
Mais comment peut-on organiser un coup d'État militaire contre une monarchie soutenue par les plus grandes puissances du monde et le réussir quand on a moins de 30 ans ? Pour répondre à cette question, il faut d'abord savoir qui ce jeune homme téméraire. Ce Mouammar Kadhafi qui est-il ?
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